jeudi 17 mars 2011

Pourim : lire la Méguilat Esther à l’endroit

L’histoire de Pourim, relatée dans la Méguila (« rouleau ») que nous lisons le soir et le jour de la fête, est bien connue. Après la destruction du premier Temple de Jérusalem (586 av.), le peuple juif est exilé à Babylone. Sous le règne d’Assuérus, il semble jouir d’une période politique favorable. Mordékhaï, l’un des derniers membres du Grand Tribunal de Jérusalem, est le conseiller du roi et Esther, nièce de Mordékhaï, est la reine. Mais le peuple juif se laisse alors aller à une forme d’insouciance. A la suite d’un complot ourdi par Haman, le premier ministre du roi, le peuple juif, auquel il voue une haine séculaire, est sous le coup d’un décret secret d’extermination totale, « du plus jeune au plus vieux, enfants et femmes, en un seul jour». Sous l’impulsion spirituelle d’Esther et de Mordékhaï, le peuple juif opère une prise de conscience et un retour vers D.ieu. Esther, conseillée par Mordékhaï, réussit à déjouer le complot d’Haman ce qui précipite sa perte. C’est ce miracle que nous commémorons avec la fête de Pourim.

Le Code de la Loi juive stipule que « celui qui lit la Méguila à l’envers n’est pas acquitté. » Concrètement, cela signifie qu’il faut lire le texte dans l’ordre des versets. Mais nous savons que chaque détail de la loi juive, aussi technique soit-il, est porteur de sens et d’enseignement. Quel est donc le sens de cette loi ?

En fait, analysant la réaction d’Esther et de Mordékhaï face au complot d’Haman, nous remarquons qu’ils disposaient de deux moyens d’actions :

§ Le réveil spirituel vers D.ieu, en particulier par la prière et le jeûne.

§ L’usage des moyens « naturels », à savoir des appuis dont ils disposaient sur l’échiquier politique, notamment la position de reine d’Esther, et les loyaux services de Mordékhaï qui avait sauvé la vie du roi.

Nous savons que la Thora nous demande toujours, face à un problème, de mener nos efforts dans ces deux domaines : l’attachement à D.ieu qui est la source de tout, et la mise en œuvre des moyens naturels pour permettre à la bénédiction de D.ieu de se réaliser. Mais Mordékhaï et Esther nous apprennent dans quel ordre ces deux efforts doivent être menés. En effet, Esther devait se présenter devant le roi Assuérus pour plaider la cause de son peuple. Mais elle demanda d’abord que les juifs, « jeunes et vieux », jeûnent durant trois jours d’affilée. Elle-même jeûna, prenant le risque de ternir sa beauté. Et c’est seulement après qu’elle se présenta devant le roi.

C’est ainsi qu’il faut comprendre la loi selon laquelle « celui qui lit la Méguila à l’envers n’est pas acquitté. » En d’autres termes, celui qui lit l’histoire de Pourim, mais « à l’envers », c'est-à-dire en inversant l’ordre des efforts mis en œuvre par Esther et Mordékhaï, n’en a pas tiré l’enseignement qu’il dégage.

Car un problème matériel doit être vu comme la manifestation dans ce monde d’un problème spirituel qui en est la source. Et c’est seulement en agissant d’abord à la source, au niveau de notre attachement à D.ieu qui conditionne la bonne marche de l’univers, que les efforts ici bas peuvent porter leur fruits.

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