Lors d'une année de 13 mois (comme l'était l'année 5768), le mois de adar est dédoublé en adar 1 et adar 2. Dans ce cas, la fête de Pourim est célébrée le 14 adar 2, (ou le 15 adar 2 à Jérusalem) dans le but de juxtaposer la délivrance de Pourim et celle de Pessa'h (puisque le mois qui suit sera celui de nissan).
Au dernier chapitre du Choul'han Aroukh section Ora'h 'Hayim (§ 697:1), il est précisé: "Le 14 et le 15 adar 1, on ne prononce pas de supplication [...] ni d'éloge funèbre et l'on ne jeûne pas. En revanche, les autres choses [les mitsvot de Pourim qui seront accomplies en adar 2] n'ont pas cours. Et celon certains, on aurait même le droit de prononcer un éloge funèbre ou de jeûner ce jour-là."
A quoi rajoute Rabbi Moché Isserlès, le "Rema" (glossateur polonais du Choul'han Aroukh): "L'usage [ashkénaze] est de suivre le premier avis. Certains disent [même] que c'est une obligation de manger plus que d'habitude et de faire grandir la joie le 14 adar 1, mais tel n'est pas l'usage. Toutefois, on mangera un peu plus que d'habitude afin d'être en règle avec l'opinion des plus stricts car celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel".
Il y a lieu de s'interroger sur les derniers mots du Rema: "celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel", qui sont d'ailleurs en fait une citation du livre des Proverbes (15:15).
L'objet des gloses du Rema est de préciser les usages répandus dans les pays ashkénazes et non d'ornementer le Choul'han Aroukh de belles paroles. Que vient donc faire ici cette citation?
En vérité, si l'on se réfère au traité Méguila du Talmud, il apparaît que selon la Michna, il faudrait se réjouir et faire un festin en adar 1 également puisque "la seule différence entre [le 14] adar 1 et [le 14] adar 2, c'est la lecture de la Méguila et les dons aux pauvres". La conclusion de la Guémara commentant ce passage est pourtant que le seul point commun entre [le 14] adar 1 et [le 14] adar 2, c'est l'interdiction de jeûner et de prononcer un éloge funèbre.
C'est-à-dire qu'il n'y a aucune obligation, selon la Guémara de faire un festin ou de se réjouir le 14 adar 1.
Selon Rabbi Akiba Eiger, c'est pour souligner cette divergence de vue entre les Sages de la Michna et ceux de la Guémara que le Rema est venu intercaler le verset des Proverbes: "celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel".
Et comment cela?
Au folio 100b du traité Sanhédrin, le verset complet des Proverbes (15:15) fait l'objet de l'interprétation suivante: "Rabbi Zeira enseigne au nom de Rav: Tous les jours du pauvre sont mauvais (1ère partie du verset) fait référence à ceux qui étudient la Guémara, tandis que Celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel (2ème partie du verset) fait référence à ceux qui étudient la Michna."
[Rachi explique cette interprétation comme suit: l'étude de la Guémara étant particulièrement ardue, ceux qui s'y adonnent sont comme des pauvres, toujours dans le manque et l'insatisfaction, tandis que l'étude de la Michna est aisée et satisfait pleinement ceux qui s'y occupent.]
C'est pourquoi le Rema, clôturant son propos sur l'avis selon lequel il faut festoyer le 14 adar 1 a cité la deuxième partie du verset des Proverbes pour faire une allusion au fait que tel est l'avis de la Michna, non de la Guémara -- allusion d'autant plus subtile que le verset parlant de festin, on aurait pu croire à une simple coquetterie stylistique de sa part.
Nous voyons de là avec quelle attention et quelle finesse nous devons lire les paroles de nos maîtres... quant au tranchant et à l'extraordinaire subtilité d'esprit de Rabbi Akiba Eiger, il ne sont plus à démontrer.
Ce commentaire de Rabbi Akiba Eiger figure dans le recueil "Mi-droushé ve-'hidoushé Rabbi Akiba Eiger 'al ha-Tora" (Jérusalem, Institut Da'at Sofer, 2e éd. 5764) d'après un manuscrit de Rabbi Ya'akov Reinowitz, membre du tribunal rabbinique de Rabbi Nathan Adler de Londres, qui le tenait lui-même de Rabbi Akiba Eiger.
Au dernier chapitre du Choul'han Aroukh section Ora'h 'Hayim (§ 697:1), il est précisé: "Le 14 et le 15 adar 1, on ne prononce pas de supplication [...] ni d'éloge funèbre et l'on ne jeûne pas. En revanche, les autres choses [les mitsvot de Pourim qui seront accomplies en adar 2] n'ont pas cours. Et celon certains, on aurait même le droit de prononcer un éloge funèbre ou de jeûner ce jour-là."
A quoi rajoute Rabbi Moché Isserlès, le "Rema" (glossateur polonais du Choul'han Aroukh): "L'usage [ashkénaze] est de suivre le premier avis. Certains disent [même] que c'est une obligation de manger plus que d'habitude et de faire grandir la joie le 14 adar 1, mais tel n'est pas l'usage. Toutefois, on mangera un peu plus que d'habitude afin d'être en règle avec l'opinion des plus stricts car celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel".
Il y a lieu de s'interroger sur les derniers mots du Rema: "celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel", qui sont d'ailleurs en fait une citation du livre des Proverbes (15:15).
L'objet des gloses du Rema est de préciser les usages répandus dans les pays ashkénazes et non d'ornementer le Choul'han Aroukh de belles paroles. Que vient donc faire ici cette citation?
En vérité, si l'on se réfère au traité Méguila du Talmud, il apparaît que selon la Michna, il faudrait se réjouir et faire un festin en adar 1 également puisque "la seule différence entre [le 14] adar 1 et [le 14] adar 2, c'est la lecture de la Méguila et les dons aux pauvres". La conclusion de la Guémara commentant ce passage est pourtant que le seul point commun entre [le 14] adar 1 et [le 14] adar 2, c'est l'interdiction de jeûner et de prononcer un éloge funèbre.
C'est-à-dire qu'il n'y a aucune obligation, selon la Guémara de faire un festin ou de se réjouir le 14 adar 1.
Selon Rabbi Akiba Eiger, c'est pour souligner cette divergence de vue entre les Sages de la Michna et ceux de la Guémara que le Rema est venu intercaler le verset des Proverbes: "celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel".
Et comment cela?
Au folio 100b du traité Sanhédrin, le verset complet des Proverbes (15:15) fait l'objet de l'interprétation suivante: "Rabbi Zeira enseigne au nom de Rav: Tous les jours du pauvre sont mauvais (1ère partie du verset) fait référence à ceux qui étudient la Guémara, tandis que Celui qui a le coeur heureux est à un banquet perpétuel (2ème partie du verset) fait référence à ceux qui étudient la Michna."
[Rachi explique cette interprétation comme suit: l'étude de la Guémara étant particulièrement ardue, ceux qui s'y adonnent sont comme des pauvres, toujours dans le manque et l'insatisfaction, tandis que l'étude de la Michna est aisée et satisfait pleinement ceux qui s'y occupent.]
C'est pourquoi le Rema, clôturant son propos sur l'avis selon lequel il faut festoyer le 14 adar 1 a cité la deuxième partie du verset des Proverbes pour faire une allusion au fait que tel est l'avis de la Michna, non de la Guémara -- allusion d'autant plus subtile que le verset parlant de festin, on aurait pu croire à une simple coquetterie stylistique de sa part.
Nous voyons de là avec quelle attention et quelle finesse nous devons lire les paroles de nos maîtres... quant au tranchant et à l'extraordinaire subtilité d'esprit de Rabbi Akiba Eiger, il ne sont plus à démontrer.
Ce commentaire de Rabbi Akiba Eiger figure dans le recueil "Mi-droushé ve-'hidoushé Rabbi Akiba Eiger 'al ha-Tora" (Jérusalem, Institut Da'at Sofer, 2e éd. 5764) d'après un manuscrit de Rabbi Ya'akov Reinowitz, membre du tribunal rabbinique de Rabbi Nathan Adler de Londres, qui le tenait lui-même de Rabbi Akiba Eiger.
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