lundi 27 août 2007

Tishri ou l’Espérance d’Israël

En cette veille de Rosh ha-Shana, je me permets de partager avec vous un enseignement de Rav Shmouel Asher Schlammé, mashguia’h de la yéshiva de Manchester. [L’entière responsabilité de l’adaptation écrite et de ses erreurs potentielles demeure mienne.]

Après la traversée de la Mer Rouge, Israël fut attaqué par son ennemi éternel, Amalec. Durant la bataille, Moshé se tint en prière, entouré d’Aharon et de ‘Hour. « Or, tant que Moshé tenait son bras levé, Israël avait le dessus ; lorsqu’il le laissait fléchir, c’est Amalec qui l’emportait » (Exode 17:11). Rashi explique que Moshé levait ses mains en prière de telle manière que ses mains elles-mêmes étaient « émouna », foi. Rashi rapporte toutefois l’élucidation du Talmud : « Etaient-ce les mains de Moshé qui gagnaient la bataille ? Non, plutôt, lorsqu’Israël [suivaient la direction indiquée par les mains de Moshé et] levaient leurs yeux vers le Ciel, ils gagnaient, etc. ».

Mais le plus étonnant est que Rashi, d’après les Sages, qualifie les mains de Moshé de « émouna », foi. La Tora n’enseigne-t-elle pas que : « La voix, c’est la voix de Jacob ; mais les mains sont les mains d’Esaü » (Genèse 27:22), c’est-à-dire que la force d’Israël réside dans sa parole, contrairement à Esaü dont la force est celle des mains ?
C’est pour cette raison même qu’Esaü porterait son nom – ‘Essav, en hébreu, provenant de la même racine que ‘assia, l’action – sa présence au monde n’étant que du domaine de l’action ; la voix à travers ses formes les plus nobles – prière, étude – demeure l’apanage de Jacob.

Du point de vue de la halakha, Rabbi Akiva Eiger (1768-1838) précise dans son commentaire sur le Shoul’han ‘Aroukh qu’en vérité, nous devrions nous aussi prier les mains tendues vers le Ciel. Ce qui nous en empêche, c’est que les nations ont adopté cet usage et qu’il nous est interdit de suivre les mêmes voies qu’eux.

Mais quelle est donc la signification d’une prière les mains tendues vers le Ciel ?
L’explication simple consiste à y voir un acte de renonciation, de résignation de l’homme : « Je ne peux rien accomplir de mes seules mains ; tout est entre Tes mains, en Ton pouvoir ».
Lorsqu’on se lave les mains avant de manger du pain, lorsque l’on fait nétilat yadayim, la signification est la même. Un homme peut avoir peiné toute la journée, lorsqu’il rentre chez lui le soir venu et s’apprête à manger, il dresse les mains qu’il vient de purifier comme pour dire : « Malgré tout mon labeur, c’est à Toi seul que je suis redevable de ma subsistance, Toi qui fais sortir le pain de la terre (ha-motsi lé’hém min ha-arets) ».

Pour obtenir le pardon divin, le peuple d’Israël dispose de deux ressources : la prière (téfila) et le repentir (téshouva). Quelle est la différence entre ces deux moyens ?

Pour le Midrash, le repentir est semblable à la mer tandis que la prière ressemble à un mikvé, un bain de purification rituelle.
De même que la mer est une étendue d’eau ouverte à tous, toujours disponible, le repentir d’un homme est toujours agréé. Rien ne peut faire obstacle à qui veut véritablement s’amender.
Le mikvé, quant à lui, est un lieu qui a ses horaires d’ouverture et de fermeture. Pour qu’une prière soit acceptée, faut-il encore savoir prier, réunir les conditions nécessaires à la prière, bénéficier d’une heure qui y soit propice (‘et ratson).

Cette idée apparaît déjà en filigranes dans la conclusion du traité talmudique Yoma, entièrement consacré à Kippour :
« Rabbi Akiva enseigne : Heureux soyez-vous Israël ! Devant qui vous purifiez-vous ? et qui vous purifie ? Votre Père qui est aux Cieux ! Ainsi qu’il est dit : “Et j’épancherai sur vous des eaux pures afin que vous deveniez purs” (Ezéchiel 36:25). Et il est encore dit : “L’espérance d’Israël, c’est D.ieu” (Jérémie 17:13) : de même que le mikvé purifie ceux qui sont impurs, de même le Saint béni soit-Il purifie Israël. »

Si les eaux pures du premier verset font allusion au repentir, à cette mer toujours ouverte, le second verset se réfère quant à lui explicitement au mikvé puisque c’est le terme même qui est utilisé, ce dernier signifiant en hébreu « espérance » aussi bien que « bain de purification ».

Pourquoi donc se répandre en prières s’il suffit de se repentir ?
Tout simplement parce que, lorsque Rosh ha-Shana approche, beaucoup d’entre nous se rendent compte que presqu’aucune de nos résolutions de repentance n’ont eu d’effet durable et que nous en sommes revenus à nos anciens travers.
Lorsque l’on réalise qu’après tant de regrets sincères et malgré une volonté qui ne l’était pas moins, nous avons répété encore et encore nos erreurs, une unique solution demeure : prier.

Depuis le 1er du mois de elloul et jusqu’au 10 tishri, le jour de Kippour, soit pendant 40 jours, D.ieu nous offre une période propice à l’acceptation des prières, à la réalisation de nos vœux d’amendement, de progrès, d’amélioration, d’élévation. Mieux qu’une mer, certes toujours ouverte mais qui nous semble infranchissable de par son immensité, il nous ouvre pendant ces 40 jours un bain de purification, un mikvé, une espérance.

Sachons saisir ces moments exceptionnels, tendons vers lui nos mains et remettons notre destin entre les Siennes en lui demandant de nous purifier pour une nouvelle année de joie, de santé et de progrès spirituel.

1 commentaire:

Igal Elmkies a dit…

Très jolie, l'explication sur la signification des mains tendues,

J'ai beaucoup aimé,

A+,

Igal